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Le don : une pratique qui se perd ? Enquête sur la génération des « millennials » [PAR YES]

Fondamentaux .

Publié le 18 octobre 2018

Ultra connectés, les yeux constamment rivés sur leur smartphone dernier cri, individualistes et autocentrés : la génération des Millennials accumule les clichés. Alors que la tranche d’âge des plus de 70 ans est la plus généreuse envers les associations, il semblerait que les millennials boudent le don. Qu’en est-il vraiment ? Ce mois-ci, Yes by Societality a enquêté sur cette génération, qui représente plus de 16 millions de Français, et son rapport au don.

« Millennials », « génération Internet », « génération Y » : malgré des limites chronologiques qui varient selon les sources, tous ces termes désignent l’ensemble des personnes nées à peu près entre 1980 et 2000, soit la génération qui a grandi avec la révolution numérique et l’explosion de la bulle Internet. C’est aussi celle qui a pris de plein fouet la crise économique de 2007-2008, d’où un rapport à l’argent (et donc au don) qui diffère de celui de leurs parents et leurs grands-parents. En effet si ces derniers, les plus de 70 ans, représentaient en 2017 31% des donneurs et 36% des montants versés aux associations en France, la génération des millennials constituait moins de 15% des donneurs et 11% seulement des montants versés (Recherches & Solidarités, 2017). Egoïstes, les millennials ?

 

Une génération marquée par la recherche de sécurité financière

Un rapport du think-tank The Resolution Foundation sur la qualité de vie des millennials dans 7 pays publié en 2018 le confirme : cette génération aurait des revenus inférieurs ou équivalents à celle de ses parents. En effet selon Mathilde Grandclaude, co-auteure de l’étude du cabinet Greenflex  « Millennials et développement durable, une vérité qui bouscule » :

« Si la crise a bien marqué la génération des millennials sur un point, c’est dans le rapport à l’argent. En effet, ils sont tous entrés sur le marché du travail au début, pendant, ou à la suite de la crise. On sent un rapport pragmatique très fort au fait de pouvoir gagner sa vie et s’assurer une certaine sécurité. Il ne faut pas oublier que plus de la moitié des millennials ont un niveau de vie moyen inférieur, voire modeste : pour eux, cela change largement la donne. Ils doivent faire attention à leur budget quotidien, pour l’alimentation, le logement, l’habillement, leurs enfants. »

Cependant, on aurait tort de leur coller une étiquette de « radins ». Selon Mathilde Grandclaude,

« La vraie différence concernant le don tient à leur rapport au collectif. Ils sont très attachés à leur entourage proche et le prennent vraiment en compte dans leurs choix de vie. En revanche, ils ont beaucoup moins la notion de l’intérêt général. S’il faut être solidaire envers quelqu’un, cela sera plutôt vis-à-vis de leur famille, de leurs amis, de leurs voisins directs ».

En outre, si les millennials donnent certes moins aux associations que leurs aînés, Recherches et Solidarités souligne quand même l’importance de leur « effort du don », soit le montant moyen de leurs dons par rapport à leur revenu moyen. Ils donnent peu, certes : mais c’est aussi parce que leurs revenus restent majoritairement inférieurs à ceux du reste de la population française. Par exemple, si les dons des moins de 30 ans ne représentaient en 2017 que 3% de l’ensemble des dons en France, l’effort du don de cette tranche d’âge était de 2,4%[1], soit le taux le plus élevé de la population française.

 

Comment attirer et capter le don des Millennials ?

Alors que le rapport annuel du Crédit Suisse sur la richesse dans le monde affirmait l’an passé que la génération Y était la grande exclue de l’accroissement de la richesse mondiale, ONG et associations doivent désormais faire face à la diminution de la taille du porte-monnaie de leurs potentiels donneurs.

Nous avons en effet interrogé Corinne Dardelet, de l'entreprise AssoConnect, qui développe un logiciel de gestion – des dons notamment – pour les associations :

 « Aujourd’hui, les ONG mettent en place de réelles stratégies de marketing pour capter des fonds : comprendre qui sont les donneurs, quelles sont leurs attentes, quels messages incitent à donner. Elles sont forcément conscientes que la tranche d’âge des millennials n’est pas celle qui donne le plus : de fait, plutôt que de potentiels donneurs, ils deviennent des porte-paroles des associations, des prescripteurs du don. Elles ne s’appuient plus sur les dons de la génération Y, mais plutôt sur son réseau. »

En effet, ultra connectés, les millennials partagent, retweetent, relaient les messages des ONG… et touchent ainsi de potentiels donneurs, plus importants. « Conscientes de ce potentiel, de plus en plus d’associations passent d’une stratégie « one to one » à « one to many » : la stratégie d’Oxfam avec l’Oxfam Trailwalker par exemple reflète bien cette nouvelle pratique ». Depuis 2012, Oxfam organise en effet dans le monde entier des trails sur un principe simple : les marcheurs s’inscrivent par équipe de 4, pour un coût de 1500 à 2000 euros par équipe. Ils organisent donc leur propre collecte de fonds auprès de leurs proches et de leurs entreprises pour pouvoir participer à la course : en 2018, plus de 346 000€ furent récoltés lors de la 11ème édition du trail.

En clair : les millennials sont loin d’être égoïstes ou autocentrés : c’est principalement l’insécurité financière qui limite la taille et la fréquence de leurs dons. S’appuyer sur leur réseau et leurs connections via les campagnes « one to many » peut permettre aux associations de rendre leurs collectes de dons plus efficaces.

 

[1] Montant moyen du don / revenu moyen x 100

 

 

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